Les Eurockéennes 2014
4, 5, 6 juillet
Belfort
A l'ouverture de l'été, nous sommes allés faire un tour du côté de Belfort... Impressions.
Vendredi 4 juillet
Arriver sur un festival avec le début d'une averse est, en général, assez inquiétant. Mais arriver sur Pixies permet d'oublier le facteur pluie. Le légendaire groupe, entraîné par Frank Black, n'a rien perdu et emmène la foule avec lui. Entremêlant disto et synthés, agrémentés des hurlements du chanteur, on est transporté dans un bordel organisé qu'on apprécie. La touche professionnelle que la foule reconnaît. La pluie s'intensifie, mais l'énergie aussi. Le temps n'est en aucun cas un problème et semble même amener la foule à redoubler d’effort dans leur appréciation de la musique.
Enchaînement avec Metronomy qui, contrairement à Solidays, nous apporte un peu plus d'eux-mêmes. Mais une fois passés les tubes de The English Riviera lorsqu’on attaque un peu plus le back catalogue du groupe, on s'ennuie vite. Quand la pop ne fait plus danser, on ne peut qu'être déçu de la prestation de Joseph Mount et de ses acolytes.
Retour donc sur la Grande Scène avec Stromae, le Roi belge, artiste attendu au tournant. Et on retrouve exactement ce que l'on aime chez lui. Avec ses musiciens, il s'accapare facilement la scène. Mise en scène minimaliste, il montre qu'il est un artiste à part entière qui croit en son personnage, sa musique, et y reste fidèle. C'est agréable de retrouver un artiste/personnage. De la discussion avec le public assit sur sa chaise avant “Tous les mêmes” à ses danses folles sur “Humain à l'eau”, on comprend son succès ! Il embrasse parfaitement le titre d'artiste.
On revient sur la Green Room pour y voir Mø. Bien que n'ayant pas prévu de la voir, je me retrouve devant un set rempli d'électricité et de douceur. Un savant mélange qui, tenu par sa magnifique voix, réussit à convaincre. Une artiste à suivre et à découvrir en live, bien différente de ce qu'elle laisse paraître.
Il était temps d'aller visiter la Plage, bien qu'en temps pluvieux, ce soit rarement recommandé.
Et donc Gramatik. Le DJ slovène met en place un set amenant vers une fin de soirée résolument électro. On passe d'un mix funky à la house-électro nous emmenant sur de la techno voire dubstep. Les grands mouvements électro sont tous visités et galvanisent une foule qui, bloquée par ce set si bien monté, ne pouvait que danser. La première journée s'achève avec un retour au sec (en partie, tout du moins).
Samedi 5 juillet
On commence la deuxième journée avec Jagwar Ma et le soleil. Les Australiens qui montent rappellent, forcément, Tame Impala. Leur musique aérienne ponctuée par la voix en retrait pleine de reverb de Gabriel Winterfield nous fait voler. Leur rock-psyché se prête parfaitement à l'ambiance. 45 minutes de set donc la totalité de leur premier album donne le sourire, notamment leur titre “Let Her Go”, dont la montée finale est parfaitement maîtrisée. Un groupe à suivre de très près et à écouter tant leur potentiel est énorme.
Avec le soleil décidé à rester, il fallait forcément se diriger vers la Plage, prise en otage par Brodinski en ce samedi 5 juillet. Petit rappel : le samedi, la Plage est laissée à un artiste - Brodinski, donc -, qui chapeaute les artistes, pour une journée remplie d'électro de toutes sortes. Autant dire que la qualité était au rendez-vous : Kaytranada, Para One, Club Cheval...
Kaytranada est là à notre arrivée. Le Canadien nous ravit par ses beats électro-hip hop en ce bel après-midi (il était 19h, OK, mais il faisait beau). Son son chill permet de faire une pause pour l'arrivée des Ecossais sur la Grande Scène : Franz Ferdinand.
Ce sont les grands noms de ce samedi, mais câlé au milieu de la foule, le son n'est pas au rendez-vous, déception. Après les avoir vus à Beauregard, je connais le feu, que ces originaires de Glasgow, patrons de la dance-rock-punk (le triple genre) peuvent mettre. Et c'est ce qu'ils faisaient. Mais un mix peu clair ou un mauvais placement dans la foule empêche de se laisser totalement emporter par leur musique. On assiste quand même à un concert de haute qualité, car on retrouve bien leur expérience scénique qui marche toujours aussi bien, quelles que soient les conditions. Mention spéciale à “Evil Eye”, une de leur nouvelle chanson, sortie sur “Right Thoughts, Right Words, Right Action” en 2013, très réussie et qui nous fait totalement rentrer dans son groove, notamment sa basse, rappelant de loin un “Another One Bites the Dust”. Pour faire danser, appelez Franz Ferdinand, vous ne serez pas déçu.
Danser, ça devrait être le deuxième nom de Parov Stelar “Band” (pour l'occasion). Parov Stelar Band, donc de l'électro-swing avec des musiciens, OK. Belle claque et coup de coeur des Eurockéennes 2014. On sait à quelle point cette musique est “dance-friendly”, mais avec une scène remplie de musiciens exceptionnels (du saxo, à la trompette en passant par le trombone et la voix, sans oublier le triangle !), on ne peut que se laisser emporter. L'utilisation d'instruments apporte une vie à la musique qui est bien mieux que de voir un artiste seul derrière sa platine (pour ce genre, plus particulièrement). Parov Stelar Band entraîne, nous fait glisser, bouger sur la boue résiduelle, finissant son set sur une touche résolument plus électro, comme une préparation pour la suite.
Suite qui sera un DJ seul, derrière sa platine, à la Plage et qui se nomme Para One. Le Français remplit aisément le vide de sa scène à coups de kicks et de basses, tout simplement. Ça envoie, ça tape. S'il fallait quelque chose pour ne pas retomber après l'euphorie de Parov Stelar Band, c'était bien Para One. Le public suit le jeu maintenant que la nuit est tombée. Le producteur français joue même quinze minutes de plus que prévu pour notre plus grand plaisir. Peut-être pas pour celui de Club Cheval qui venait après. Petit mot là-dessus : voir des artistes dépasser leurs horaires montre qu'ils apprécient ce qu'ils font. Ça soulage à une époque où le business est roi. Le côté négatif, évidemment, c'est que ça met l'organisation dans une situation compliquée.
Du coup, Club Cheval, dont seulement deux des quatre membres étaient présents, enchaîne parfaitement. Les Français servent une électro maîtrisée avant de laisser place au grand chef de la Plage, Brodinski.
Que dire, le producteur de “Dance Like Machines” ne déçoit pas. L'ayant déjà vu, je me décide à faire une pause Plage pour aller voir M.I.A.
Mal m'en a pris. A part sa mise en scène, peut-être ici pour cacher la misère, l'Anglaise ne transmet rien. Elle est vide, tellement, qu'on ne l'entend pas au micro.
Je m'éclipse pour me retrouver à la Plage, me demandant pourquoi je l'ai quittée, tellement Brodinsky suivi de LOUISAHHH!!! continuent à nous enjouer.
Direction, pour finir, Skrillex sur la Grande Scène. L'ayant vu pour la dernière fois au Social Club, je me demandais ce que l'Américain donnait actuellement, bien que peu fan de sa musique, avouons-le. Eh bien, je ne sais toujours pas ce qu'il donne. On va du tout au n'importe quoi au passant par le rien qu'on saupoudre de violence. Oui, ça fait bouger. Normal, on passe notre temps à essayer d'esquiver les claques qu'il veut nous mettre. Le problème est qu'il manque un fond musical. La violence, à elle seule, ne peut pas être musique.
C'est l'heure de rentrer au camping, par les rails ou la navette, les deux choix mettant autant de temps à cette heure-là. Un camping à faire, par ailleurs, et sûrement le meilleur des différents festivals que j'aie eu l'occasion de faire. Evidemment, on dort 3h par nuit/jour, mais l'ambiance y est réelle et festive, on y croise de tout. Le système des navettes marche bien, et en cas de grosses queues, le chemin par la voie ferrée désaffectée est très sympathique et à faire, donnant une vraie identité au festival. L'organisation, le site est vraiment fait pour que tout se passe dans les meilleures conditions possibles. Un merci à l'organisation et la sécurité d'ailleurs, qu'on cite trop peu souvent alors qu'ils travaillent dur, assurant le bon déroulement du festival. On voit bien que les Eurockéennes est un festival rôdé, fort de ses 25 ans d'expérience.
Parlons aussi des intermittents, qui sont intervenus chaque jour pour défendre leur cause et remercions-les à nouveau pour le travail fourni, sans eux, on ne pourrait prendre tant de plaisir, alors soutenons leur cause.
Dimanche 6 juillet
Dernier jour de festival que nous commençons avec Patrice et son “Rising of the Son”. L'originaire d'Allemagne est toujours aussi sympathique, sa musique, en plus agrémentée de soleil, nous fait apprécier son “sweggae”. On a parfois l'impression que le reggae peut être une musique lente, mais elle est totalement festive et faite parfaitement pour un format live. Patrice développe aussi une énergie sans nom sur scène, sautant partout, chantant, dansant, allant jusqu'à reprendre “I Like to Move It” de Reel 2 Real. Aussi improbable que ça puisse paraître, il réussit à attraper la foule et la faire sauter.
Après “Rising of the Sun (sic)” de Patrice, on passe plutôt à “The Rain” (sur “Black Chandelier EP”) avec Biffy Clyro. Les Ecossais nous entraînent dans un live plein d'émotion. Leur rock, qui sonne un peu trop mainstream parfois, apporte les nuages et une fine pluie, parfaite pour, notamment, “Many of Horror”, menée par une voix maîtrisée de Simon Neil qui n'a rien à envier aux plus grands.
Viennent plus tard Foster the People. Les auteurs de “Pumped Up Kicks” délivrent un live résolument plus rock que ce à quoi on pourrait s'attendre. Le charismatique Mark Foster tient à merveille la foule. On retrouve bien en lui l'esprit du showman, bien qu'il surjoue quelque peu parfois.
Arrive enfin Robert Plant and the Sensational Space Shifters, le mythique chanteur de Led Zeppelin. Il ouvre le bal en nous faisant comprendre qu'il va falloir profiter du temps accordé avec “Baby I'm Gonna Leave You” sur “Led Zeppelin”, joué d'une main de maître par son guitariste Liam Tyson. On est tout de suite marqué par la maîtrise vocale de Robert Plant, qui n'a rien perdu. Son coffre, sa justesse et ses cris sont parfaits. Seule sa chevelure grisonnante nous rappelle qu'il a vieilli. La setlist est construite de façon à enchaîner une chanson de Led Zeppelin pour une chanson de the Sensational Space Shifters. Les chansons de Led Zep sont remaniées à la sauce Sensational Space Shifters, avec des synthés, mais surtout avec une touche de musique africaine, emmenée par le joueur de ritti Juldeh Camara. Ce mélange se mixe parfaitement au style de Led Zeppelin et les nouvelles chansons présentées par le groupe ont un style très intéressant. On est dans un blues-rock-électro-musique du monde (un quadra terme, eh oui). Et ça fonctionne. Le groupe finit sur “Rock and Roll”, sans solo de guitare, à nouveau, comme pour “Whole Lotta Love”, par exemple. Sûrement par respect pour Jimmy Page.
On passe ensuite par FAUVE. Cette année, les Français ont eu droit à une plus grande scène, ce qui a l'air de leur réussir tant la Green Room est bondée. FAUVE, ça annonçait un peu la déprime de la journée, mais au final, un live rock, qui bouge plus que ce à quoi on peut s'attendre. Evidemment, sur les écrans, les visages sont floutés pour respecter l'esprit du collectif d'une vingtaine de personnes et leur non-personnification.
Enfin, le dernier live de la journée, The Black Keys. Si les Américains sont attendus au tournant, ils déçoivent malgré tout. On retrouve un live qui manque d'énergie, de punch, alors que c'est ce qu'on attend d'eux. La performance est un peu monotone, même portée par leurs chansons-phare comme “Lonely Boy”. La voix de Dan Auerbach n'est pas aussi frappante ni présente comme elle peut l'être sur leur album. En tournée pour “Turn Blue”, ils veulent montrer qu'ils tiennent à cet album. Mais le côté disco ne prend pas, dommage. Trop de pause entre les chansons casse le rythme et le non-côté duo les pousse peut-être à se relâcher. En revanche, un encore, a priori non prévu, arrive parfaitement pour cette fin de festival avec “Little Black Submarines”. La guitare acoustique de Dan Auerbach résonne avec les feux d'artifices en fond, pour un final de rêve et la grande réussite de ce concert.
Les dernières notes sonnent le bouquet final, il est temps de partir et de revenir à une vie normale.
Un grand merci à l'organisation et à toutes les personnes travaillant sur les Eurockéennes, rendant un festival magique possible.
Benjamin R.
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